Auteur : Manu Steens
Dans ce blog, j’écris mon idée personnelle, pas celle d’une organisation.
Une première lecture pour s’inspirer du framework Cynefin dans le livret « Le Cynefin-Book – Une introduction à la complexité et le framework Cynefin » donne de l’inspiration pour réfléchir à la crise du covid19.
Permettez-moi d’abord d’expliquer le cadre Cynefin lui-même, le cadre théorique qui essaie de créer un ordre dans les types de systèmes, tels que le monde.
Une première division est faite entre les systèmes ordonnés et les systèmes non ordonnés .
Un système ordonné est fortement borné, le comportement est très prévisible. La causalité ressort clairement de l’expérience ou repose sur une analyse vertueuse. Le premier cas est un système simple , le second un système compliqué (mais compréhensible).
Nous ne pouvons pas établir de causalité dans un système non ordonné. Certains de ces systèmes sont stables, où les limites évoluent avec le temps, tout comme le comportement. Cette évolution se produit par l’interaction de ses composants. L’évolution ne peut donc pas être appelée situationnelle (c’est-à-dire causée uniquement par des facteurs externes) mais dispositionnelle: causée par des dépendances et des interactions internes, souvent inconnues et changeantes. Ainsi, ils sont prédestinés à évoluer dans une direction prédestinée. Mais la causalité ne peut être prouvée que rétrospectivement (avec le recul). Ces systèmes stables sont les systèmes complexes.
Mais certains systèmes ne sont pas stables, ils ont peu ou pas de limitations, le comportement est ou semble aléatoire. Ce sont des systèmes chaotiques.
Enfin, il y a les systèmes que nous n’avons pas encore classés, et ce sont les systèmes perturbés: nous ne savons pas encore ce qu’ils sont.
Les systèmes simples, on les connaît: « been there, done that ». Ce sont des connus connus. Une solution sans ambiguïté est possible pour un problème sans ambiguïté. La solution est donnée par SCR : sentir, catégoriser, répondre. Nous avons les meilleures pratiques.
On ne sait plus ce que sont les systèmes compliqués. Ce sont des inconnues connues. Mais nous pouvons l’analyser en détail et ensuite nous pouvons prédire des choses à ce sujet. L’approche est alors SAR : sentir, analyser et répondre. Nous avons de bonnes pratiques.
Les systèmes complexes sont ceux d’inconnus inconnus. Nous devons mener des expériences et espérons qu’elles nous guideront dans la bonne direction. Il y a beaucoup d’hypothèses, sans pouvoir les appeler fausses ou justes. L’approche est donc SSR : sonder, sentir et répondre. Ici, nous avons de nouvelles pratiques émergentes.
Et les systèmes chaotiques sont les inconnues inconnaissables. Le système nécessite une action immédiate, mais nous n’avons aucune idée des actions appropriées. Alors on s’y attaque avec ASR: agir (faire quelque chose), sentir et répondre. Ici, nous avons des pratiques nouvelles mais peut-être transitoires car elles peuvent n’être utilisables qu’une seule fois.
Enfin, les systèmes perturbés, que nous n’avons pas encore explorés pour les classer.
Si une situation nous vient à l’esprit, le conseil est: d’abord différencier de quel type de système il s’agit. Si nous n’en savons rien, ou s’il s’agit d’une matière « oubliée » et que cela semble quelque chose de complètement nouveau, il est préférable de l’explorer d’abord, en gardant à l’esprit qu’il peut s’agir du pire des cas, donc selon les systèmes ordonnés ou non-ordonnés une situation compliquée ou chaotique. Si nous faisons cela, nous évitons le risque de simplification excessive à l’avance.
Comment cela correspond-il au Covid19 ?
On savait dès les premières enquêtes qu’il s’agissait d’un virus de type corona. Il y a eu une certaine expérience avec ça. En conséquence, il semblait être un système ordonné. Cependant, il est vite devenu clair que ce virus particulier n’était pas aussi connu qu’on le pensait à l’origine. Ce n’était pas un « simple rhume ». Le monde avec covid19 est ainsi rapidement devenu un système non ordonné à partir d’un système ordonné. Il fallait donc agir vite. Dans le livre de Philippe De Backer « En nu is het oorlog » (« Et maintenant c’est la guerre »), il apparaît que la démarche ASR a été adoptée très rapidement. Et c’était une bonne chose. La première vague a été systématiquement sévèrement traitée de manière radicale. Il y a eu un confinement, et la vague a été contenue. Une presque deuxième vague a été abordée par la province d’Anvers avec des mesures strictes, et a également été supprimée. Si vite, en fait, que beaucoup ont osé demander pourquoi c’était nécessaire. Pendant un moment, il a semblé que le monde sous covid19 deviendrait un système complexe ou même un système compliqué et ordonné. Y a-t-il fait ça ? Les techniques existantes ont produit de nouvelles armes: plusieurs types de vaccins ont été créé. On parlait de « la lumière au bout du tunnel ». La liberté était en vue. Un système chaotique serait repoussé par la science à un système compliqué, où les vaccinations sont au cœur de celui-ci.
Et un nouveau danger menace le champ de bataille : la « pensée de groupe ». En l’estimant, il peut être évité.
La pensée de groupe est un problème typique des systèmes compliqués. Nonobstant une grande vérité qui se cache derrière la sagesse des masses, en tant que moyenne d’un groupe d’experts dans le domaine. Mais ensuite avec des points de vue qui les rendent d’abord indépendants les uns des autres. C’est pour éviter qu’ils s’influencent (trop). Il est difficile de le faire tout les jours, une approche efficace est donc nécessaire contre cela, ainsi que pour améliorer la numérisation de l’information. Pour aborder ce problème, il est préférable d’impliquer différents groupes d’experts, chacun de différents domaines d’expertise, afin qu’ils puissent garder un « regard émerveillé » sur les autres domaines d’expertise.
Il n’y a pas de questions stupides dans un tel groupe. Mais il faut les demander. Une question pourrait concerner la composition du GEMS lui-même. Après tout, outre les infectiologues, les virologues et les biostatisticiens, les anthropologues, les sociologues, les experts comportementaux, les psychologues et les experts météorologiques sont-ils également nécessaires dans un organe consultatif ? La question m’est venue pour deux raisons.
- La maladie trouve toujours une issue dans une nouvelle variante avec laquelle, lorsque l’on revient d’un système compliqué qui semblait ordonné grâce aux vaccins, à un système chaotique, qui semble désordonné par l’arrivée d’une nouvelle variante mortelle, mais surtout:
- La maladie attaque par les personnes qui ne sont pas malades au moment de l’attaque, mais qui par leurs comportements et habitudes menacent de s’exposer à la maladie. La différence de comportement des gens au cours des différentes saisons détermine les contacts qu’ils établissent. Ces comportements forment ainsi les canaux par lesquels la maladie peut se propager.
Connaître ce comportement des différents groupes cibles avec une résolution suffisamment faible par rapport à l’évolution des vagues de maladie précédentes pourrait fournir de meilleurs paramètres pour les modèles statistiques concernant ces groupes cibles et entre eux. Même s’ils ne peuvent jamais être considérés comme un modèle à valeur purement prédictive, il pourrait fournir un aperçu du comportement du passé, de sorte que des attentes plus affinées puissent être créées pour le futur le plus proche.
Si ces experts coopéreraient déjà aux propositions et conseils d’un organe consultatif, ce n’est pas clair: je ne les vois jamais dans les reportages. Je n’entends jamais aucune mention de leurs contributions.
Puisque le système sur lequel un système chaotique doit être traité est un système de l’acronyme ASR, nous ne pouvons jamais supposer que nous savons ce qui va se passer, même avec les modèles statistiques les plus sophistiqués disponibles à l’heure actuelle. Par conséquent, tant que quelqu’un peut présenter un argument cohérent, son idée est précieuse.
Mais avec cela vient la question: où mène un tel modèle ? A quoi va aboutir l’approche de la crise actuelle ? Essayent-ils de vaincre la maladie ? Arrêter la propagation ? Ou est-il plus logique de travailler avec un modèle dans lequel on essaie de contrôler la maladie ?
L’essentiel dans un mécanisme de contrôle est que l’on ne regarde pas seulement les mesures statistiques directes telles que la valeur Rt, le nombre de malades dans les hôpitaux, le nombre de malades dans les soins intensifs, le nombre de cas dans les écoles etc. Et cela par province et dans le temps. Ce sont des indicateurs « directs » , des chiffres qu’ on veut avoir bas, parcontre la vaccination, qu’ils veulent voir augmenter. En influençant directement le comportement.
Si l’on accepte que le corona ne sera pas seulement vaincu, mais que nous devrons purger une peine dans cette prison appelée Terre, jusqu’à ce que la maladie se soit adaptée à son hôte, on pourrait commencer en marge avec des indicateurs « indirects ». J’entends par là des indicateurs avec lesquels on peut influencer indirectement le comportement des gens, pour lesquels nous devons compter sur l’expertise des anthropologues, des sociologues, des psychologues, ainsi que des experts météorologiques et les expériences des autorités avec, entre autres, le tourisme. L’un de ces indicateurs que l’on pourrait suivre pourrait être un « score net de promoteur de bon comportement ». On pourrait prendre une telle philosophie d’une entreprise comme Apple, qui mesure un « score de promoteur net » (net promotor score : NPS) pour déterminer la satisfaction du point de vue du client.
Pour Covid19, cela signifie qu’avec une telle mesure indirecte, on pourrait connaître l’implication au sein des différents groupes cibles, ce qui peut mesurer indirectement l’efficacité des conférences de presse. Après un certain temps, on peut tracer ces chiffres dans une évolution, et voir comment cela évolue, mais aussi comment cela se compare aux infections dans les différents groupes cibles. En ciblant également ces indicateurs indirects, en plus d’une tentative d’arrêter la maladie, on pourrait aussi tenter de contrôler la maladie plutôt que de l’arrêter directement. Et cela jusqu’à ce que le virus ait été préalablement affaibli pour son hôte, ou jusqu’à ce qu’une technique de vaccination émerge qui permette une vaccination unique qui offre une protection à vie si cela est possible. L’avantage supplémentaire d’un tel effet de contrôle pourrait être que les gens sont préparés à l’idée d’une vaccination unique, qui peut alors être plus facilement acceptée.
Même s’il n’a pas été prouvé qu’une telle approche fonctionnerait dans un court laps de temps, je pense qu’en plus d’essayer d’arrêter la crise, nous devrions également créer toutes les opportunités pour essayer de contrôler la crise. Mais c’est beaucoup d’essayer avec « peut » et « pourrait » et « peut-être » l’un après l’autre. Cette approche signifierait une approche radicalement différente et supplémentaire à l’approche traditionnelle, dans laquelle on essaie de réduire un système non ordonné à un système ordonné sur la base d’arguments purement rationnels. Avec lequel on essaie de travailler sur le comportement de « l’homo rationalis ». Avec une approche indirecte, on peut également travailler sur les groupes cibles où l’on a plus à voir avec l’ « homo irrationalis ».